A propos de ce blog

C'est durant ma petite enfance que j'ai découvert l’œuvre de Georges Brassens, grâce à mon père qui l’écoute souvent durant les longs trajets en voiture. Sur la route des vacances estivales, j'ai entendu pour la première fois Le Petit Cheval alors que je n'avais que 4 ans. C'était en août 1981. Au fil des années, le petit garçon que j'étais alors a découvert bien d'autres chansons. Dès l'adolescence, Georges Brassens était ancré dans mes racines musicales, au même titre que Jacques Brel, Léo Ferré, Barbara et les autres grands auteurs-compositeurs de la même génération. M’intéressant plus particulièrement à l’univers du poète sétois, je me suis alors mis à réunir ses albums originaux ainsi que divers ouvrages et autres documents, avant de démarrer une collection de disques vinyles à la fin des années 1990. Brassens en fait bien entendu partie. Cet engouement s’est accru au fil du temps et d’évènements tels que le Festival de Saint-Cyr-sur-Morin (31/03/2007) avec l’association Auprès de son Arbre. À l’occasion de la commémoration de l’année Brassens (2011), j’ai souhaité créer ce blog, afin de vous faire partager ma passion. Bonne visite... par les routes de printemps !

J'ai rendez-vous avec vous

"Chaque fois que je chante une chanson, je me fais la belle." Georges Brassens

lundi 25 avril 2016

Georges Brassens, Marcel Pagnol et Les copains: ce n'était pas du cinéma !

Un autre esprit était proche de Marcel: Georges Brassens. Dans beaucoup de chansons, Brassens parle de ses amis. Marcel adorait la manière dont il en parlait, il adorait Les copains d'abord. Partageait-il cette vision du monde: "Les femmes, oui, mais avant tout les copains" ? Ça, je n'en suis pas sûre. Je n'irai pas jusqu'à l'affirmer. Mais quelque chose de cette chanson trouvait en lui des résonances profondes. Vous savez que c'est grâce à Marcel que Brassens a reçu un prix de l'Académie française ? J'ai eu le plaisir d'annoncer moi-même la nouvelle à l'heureux lauréat. Un merveilleux souvenir...

- Quelle à été la réaction de Brassens en apprenant qu'il avait obtenu ce prix ?
 

Celle d'un ours intimidé, mais content. [Jacqueline Pagnol in Ferrari A., 2000. La gloire de Pagnol, Actes Sud Beaux Arts, 288 pp.]

L'évènement relaté par Jacqueline Pagnol eut lieu le 08/06/1967. Et c'est plus précisément le Grand Prix de Poésie de l’Académie française qui fut décerné à Georges, lequel ne donna pas suite - la chose est connue - à la suggestion de plusieurs académiciens de le voir poser sa candidature pour siéger avec eux sous la coupole du Collège des Quatre Nations. Parmi ces "immortels" figurent en particulier Joseph Kessel et Marcel Pagnol. Le sujet fut évoqué dans l'émission Nonobstant diffusée du 24 au 27/12/2007 sur France Inter et au fil de laquelle Jacqueline Pagnol s'entretenait avec Yves Calvi, évoquant ses souvenirs autour du cinéma, de la littérature et de diverses rencontres, dont Georges Brassens. Ce dernier avait fait la connaissance de l'auteur de la Trilogie marseillaise par l'intermédiaire de Louis Nucera. Entre eux, l'estime fut réciproque et des liens ainsi naquirent. Ce d'autant plus que l'intérêt de Marcel Pagnol pour les textes du poète sétois était réel, ainsi que l'explique son épouse:

Jacqueline Pagnol: "Le répertoire de Brassens, j'y reviens, enchantait Marcel. J'avais acheté les textes des chansons,  je lui lisais, puis nous les chantions..."

À plusieurs reprises, ils se retrouvèrent pour parler poésie. Des conversations aux accents méridionaux, agrémentés d'un verre de pastis. Comme ici,
le 31/08/1954, en compagnie de Jacqueline Pagnol et de la chanteuse et comédienne québécoise d'origine française Claire Oddera dite Clairette (qui avait accédé à la notoriété grâce à son rôle d'Amanda Amoretti dans La Fille du puisatier (1940) avec Raimu et Fernandel). La rencontre se déroula à Paris, dans l'hôtel particulier de Pagnol au square du Bois-de-Boulogne (actuel square de l'Avenue-Foch), après que Georges eut assuré des récitals à Marseille les 28 et 29/08.

Jacqueline Pagnol, Georges Brassens, Marcel Pagnol et Clairette D.R.

Le cinéma, principal sujet de leur conversation, ne les vit en revanche pas se rejoindre comme Pagnol l'eut souhaité: en effet, bien qu'il proposa à Brassens le rôle du berger - celui de Stéphanette étant prévu pour Jacqueline - dans Les Étoiles (adaptation de la nouvelle d’Alphonse Daudet), le projet ne se concrétisa pas. Déçu par l’échec des Lettres de mon moulin (1954) - en fait l'adaptation de trois contes: Le Secret de maître Cornille, l’Élixir du révérend Père Gaucher et Les Trois Messes basses, le fondateur de la revue littéraire Fortunio (devenue ensuite Les Cahiers du Sud) décida d’abandonner le cinéma. Quoi qu'il en soit, Georges avait de toute façon poliment décliné l’offre, ne se sentant pas fait pour le cinéma. Porte des Lilas (1957), réalisé par René Clair d'après roman de René Fallet La Grande Ceinture, marqua sa seule prestation en tant qu'acteur, si l'on excepte la fiction poétique Pourquoi t'as les cheveux blancs ? (1973).

Cependant, il est intéressant de se souvenir de la présence de Pierre Maguelon à la distribution du diptyque d'Yves Robert La Gloire de mon Père / Le Château de ma Mère (1990), adaptation d'une partie du cycle des Souvenirs d'enfance de Marcel Pagnol (Louis Nucera participa à l'élaboration du script du premier des deux films). Proche de Brassens, celui qui fut surnommé "Petit Bobo" (en raison de sa ressemblance avec le boxeur Bobo Olson et en hommage au batteur et percussionniste de jazz Willie Bobo [Lamy J.-C. - Brassens, le mécréant de Dieu - p. 292]) tenait le rôle de François, père de Baptistin Joseph David Magnan dit Lili, ami d'enfance de Pagnol.

Philippe Caubère, Victorien Delamare, Julien Ciamaca et Pierre Maguelon dans La Gloire de mon Père (1990)
 
  
Sur France 3 Marseille le 15/08/1995, Louis Nucera est interviewé dans Itinéraire bis. Il évoque ses souvenirs avec Marcel Pagnol et le travail d’adaptation qu'il a réalisé pour La Gloire de mon Père
 
Dans les deux téléfilms - Le Temps des Secrets et Le Temps des Amours - réalisés en 2006 par Thierry Chabert pour France Télévision, Pierre Maguelon incarnait André Pagnol, père de Joseph.

Pour en revenir à Brassens, il est un autre personnage haut en couleurs qui le liait indirectement à Pagnol: Vincent Scotto. Compositeur d'origine marseillaise à qui l'on doit près de 4 000 chansons et 60 opérettes, il œuvra beaucoup pour le cinéma avec, à son actif, plus de 200 bandes originales de films dont 13 qui lui permirent de collaborer avec le réalisateur de Jofroi (1934), long-métrage dans lequel il se vit offrir amicalement le rôle-titre. Brassens appréciait beaucoup les mélodies de Scotto, simples et faciles à mémoriser. Pour le double 33T Chante les chansons de sa jeunesse (Philips 6622 032 - 1982), il enregistra Adieu Venise  provençale (H. Allibert et R. Savill, V. Scotto), qui ne figura pas parmi les vingt-sept chansons retenues à l'époque. Le coffret La mauvaise réputation (2001), édité pour le 20e anniversaire de la mort du poète sétois, dévoila la seconde dans le CD N°13: Georges Brassens - Inédits. 

Dans son article "Quelques livres de chevet", publié dans la revue Les Amis de Georges et que l'on retrouve dans Brassens - D'affectueuses révérences (2000), André Tillieu évoque Marcel Pagnol dont les livres figuraient en bonne place dans la bibliothèque de l'auteur des Copains d'abord. Ce dernier, au cours de nombreuses conversations avec son ami "le belge", parlait souvent de celui qui, comme lui, était un amoureux des mots.

Marcel Pagnol: "(...) Ce que j'écoutais, ce que je guettais, c'était les mots: car j'avais la passion des mots; en secret, sur un petit carnet, j'en faisais une collection, comme d'autres font pour les timbres." [Pagnol M., 1957. La Gloire de mon Père, Pastorelly, 304 pp.]

Mais laissons la conclusion à Mario Poletti qui nous raconte une anecdote croustillante, vécue en 1975, année de parution du roman de René Fallet Le Beaujolais nouveau est arrivé. Un dîner copieux dans un restaurant parisien en compagnie du directeur des éditions Denoël et de l'acteur et réalisateur Jacques Fabbri, le vin contribuant à animer l'ambiance et...

Mario Poletti: "(...) Georges est ému. Son esprit embrumé lui joue des tours. Voulant appeler le directeur (sujet de Sa Majesté) du nom du personnage de Dickens, Mr Pickwick, il l'appellera toute la soirée, M. Piquoiseau, personnage de Marcel Pagnol." [Poletti M. - Brassens me disait... - p. 77]

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire