A propos de ce blog

C'est durant ma petite enfance que j'ai découvert l’œuvre de Georges Brassens, grâce à mon père qui l’écoute souvent durant les longs trajets en voiture. Sur la route des vacances estivales, j'ai entendu pour la première fois Le Petit Cheval alors que je n'avais que 4 ans. C'était en août 1981. Au fil des années, le petit garçon que j'étais alors a découvert bien d'autres chansons. Dès l'adolescence, Georges Brassens était ancré dans mes racines musicales, au même titre que Jacques Brel, Léo Ferré, Barbara et les autres grands auteurs-compositeurs de la même génération. M’intéressant plus particulièrement à l’univers du poète sétois, je me suis alors mis à réunir ses albums originaux ainsi que divers ouvrages et autres documents, avant de démarrer une collection de disques vinyles à la fin des années 1990. Brassens en fait bien entendu partie. Cet engouement s’est accru au fil du temps et d’évènements tels que le Festival de Saint-Cyr-sur-Morin (31/03/2007) avec l’association Auprès de son Arbre. À l’occasion de la commémoration de l’année Brassens (2011), j’ai souhaité créer ce blog, afin de vous faire partager ma passion. Bonne visite... par les routes de printemps !

J'ai rendez-vous avec vous

"Chaque fois que je chante une chanson, je me fais la belle." Georges Brassens

lundi 11 décembre 2017

Rolland Hénault, George Sand et Alfred de Musset

Le Berry. Province historique de la France de l'Ancien Régime constituant l'un des plus vieux terroirs agricoles du pays. Sa campagne, qui sert souvent de cadre aux romans de George Sand, vit également naître le romancier, poète et essayiste libertaire Rolland Hénault le 25/05/1940. Originaire de Saint-Valentin (36), celui qui compta entre autres Cabu et Cavanna dans son entourage fut l’un des trois co-fondateurs du magazine La Bouinotte en 1982, avec Léandre Boizeau et Gérard Coulon. Il y tint la cultissime rubrique satyrique du Plouc, illustrée par Christian Hirlay. Sa plume acérée et néanmoins trempée dans l’humanité de l’anarchisme le rapproche de Georges Brassens, usant de l'humour et de la malice comme ultime politesse. C'est à cet instant précis qu'il nous faut noter les liens des deux virtuoses des mots avec la Fédération anarchiste française. Le poète sétois publia longue série d'articles dans Le Libertaire sous les pseudonymes de Geo Cédille, Gilles Colin ou G.C. du 28/06/1946 au 12/06/1947. [Felici I. (dir.), Bories F., Boulouque S., Gurrieri P., Perolini C. et Steiner A. - Brassens anarchiste - pp. 199-213] Rolland Hénault - dit "Guimou de la Tronche" pour l'occasion, écrivit un peu plus tard des chroniques dans Le Monde libertaire.

De plus, dans son parcours militant, il fut marqué par Maurice Laisant (refondateur, après la Seconde Guerre mondiale, de la Fédération anarchiste aux côtés d'Henri Bouyé notamment), puis il se joignit par la suite à l’association des Amis de Louis Lecoin (vieille connaissance anarchiste de Brassens) et participa à l’hommage qui lui fut rendu le 04/10/2008 à Saint-Amand-Montrond (18) pour pour le 120e anniversaire de sa naissance. On notera par ailleurs le très intéressant article qu'il lui consacra dans le second numéro de La Bouinotte, paru en automne 1982: Louis Lecoin - Un berrichon dans le combat pour la paix. Professeur de lettres au collège Les Capucins, au lycée Pierre et Marie Curie puis au lycée Blaise Pascal à Châteauroux à partir des années 1960, il n'est pas exclu qu'Hénault se fut trouvé parmi le public de l'auteur-compositeur de La mauvaise réputation lorsque celui-ci se produisit à deux reprises dans la ville natale du poète Maurice Rollinat: le 27/02/1960 et le 29/02/1964. Également auteur de textes de chansons pour Élisabeth Gillet, sa belle-fille, il participa à partir de 1990 aux spectacles Élisabeth et Guimou de la Tronche dans des petites salles de Paris et de sa banlieue, ainsi qu'en région Centre. De plus, il donna de nombreuses conférences en particulier sur les écrivains libertaires au Cercle Condorcet de Châteauroux. Rolland Hénault ne manqua pas de citer fréquemment Brassens dans les divers articles qu'il écrivit (les plus récents furent publiés entre autre dans Torticolis, Le Gargaillou, Le petit stupéfiant, L'Écho de la Creuse et, bien sûr, La Bouinotte) et auxquels Jean Huguet fait référence dans un hommage rendu publiquement à son collègue et ami au château de Chabenet lors d’une des premières éditions du salon L’Envolée des Livres (créé en 2006). Par ailleurs, il fit paraître une présentation de l'ouvrage de Joseph Moalic Avec Fanon (1995), dans le N°29 de la revue Les Amis de Georges (janvier-février 1996). Maurice Fanon se place, selon Rolland Hénault, sur la même marche que ses confrères Georges Brassens, Jacques Brel et Léo Ferré.

Si les tournées effectuées par le poète sétois ne l'amenèrent que relativement peu souvent dans le Berry* (aux deux dates castelroussines s'ajoutent cinq passages dans le Cher (18): à Léré le 29/07/1956, à Vierzon le 02/03/1959 et à Bourges les 07/03/1956, 02/04/1962 et 16/11/1963), il fut probablement marqué par l'histoire de la région via ses lectures. George Sand semble y figurer en bonne place, avec tout d'abord le roman La Petite Fadette (1849) dont la protagoniste, Fanchon Fadet, est la petite-fille d'une sorcière de village et a elle-même mauvaise réputation en raison des pouvoirs de sorcière qu'on lui attribue.

Moi, mes amours d'antan c'était de la grisette :
Margot, la blanche caille, et Fanchon, la cousette...
Pas la moindre noblesse, excusez-moi du peu ;
C'étaient, me direz-vous, des grâces roturières,
Des nymphes de ruisseau, des Vénus de barrière...
Mon prince, on a les dam's du temps jadis qu'on peut.

La référence est sans équivoque, dans ce premier sizain des Amours d'antan. Dans son ouvrage La femme dans l’œuvre de Georges Brassens (1991), Paul Ghézi note l'intérêt de Brassens pour ces dames à la petite condition sociale et à la simplicité suggérant par certains aspects le personnage du roman que George Sand écrivit en été-automne 1848 et qui recèle nombre d'observations sur les us et coutumes du monde rural. Remarquons par ailleurs que, dans le Bulletin de la République N°8, Sand écrivit une charge contre l’injustice et la misère en général. Des concepts que le sétois moustachu dénonça à sa manière, au fil de ses chansons. Une des premières qui vient à l’esprit ici étant Pauvre Martin, qui aborde aussi le thème de l’exploitation de l’homme par l’homme. Mais Brassens ici suggère, ainsi que l’exprime André Sallée dans Brassens (1991) : "Le "doux chant" lui convenait mieux, même lorsqu’il se révoltait au nom de ceux que le ciel colle à la terre." Il est intéressant de relever d'autres vers qui renvoient aux écrits de la Bonne Dame de Nohant. Ainsi, dans Tempête dans un bénitier:

George Sand par Auguste Charpentier (1838)
© Musée de la vie romantique (Paris).
A Lourdes, Sète ou bien Parme,
Comme à Quimper Corentin,
Le presbytère sans le latin
A perdu de son charme.

Georges s'inspire ici d'une locution qui apparaît dans la deuxième des Lettres à Marcie (1843), dont la parution initiale se fit dans Le Monde de l'abbé Lamennais en février et mars 1837: "Le presbytère n'a rien perdu de sa propreté, ni le jardin de son éclat." Plus d'un demi-siècle après, Gaston Leroux se l'appropria pour écrire la fameuse phrase énigmatique prononcée par Joseph Rouletabille dans Le Mystère de la chambre jaune (1907): "Le presbytère n'a rien perdu de son charme ni le jardin de son éclat." Sans compter le recueil Arbres (1976) de Jacques Prévert, illustré de gravures de Georges Ribemont-Dessaignes. On y trouve une formule presque identique: "Le presbytère n’a toujours rien perdu de son charme ni le jardin de son éclat." Comme l'explique un des dialogues virtuels signés de main de maître par Robert Le Gresley, tout ceci orienta sans doute la pensée de Brassens pour l'écriture du Progrès, texte que le sétois laissa brut, sans musique. Cette dernière fut l’œuvre de Jean Bertola qui enregistra la chanson ainsi créée en 1985, pour le 33T Le Patrimoine De Georges Brassens Par Jean Bertola (Philips 824 825-1).

D’autres parallèles peuvent également être établis. Intéressons-nous aux deux premiers romans publiés par George Sand en 1832. Dans Indiana, que la Bonne Dame de Nohant signa pour la première fois du nom de George Sand, elle exprime son rejet de la peine de mort, celui-là même qui habita l’esprit de Georges Brassens durant toute sa vie. Dans Valentine, son expérience personnelle du mariage l’amène à évoquer, dans sa conception du moment, le thème de l’union libre, dont le poète sétois fait l’éloge dans La non-demande en mariage. Ceci nous permet d’aborder une des thématiques de prédilection de l’autrice de François le Champi (1848) : le féminisme - traité sous certains aspects dans plusieurs textes de Brassens (La non-demande en mariage, Quatre-vingt-quinze pour cent…) - dont elle fut un des plus grandes initiatrices. Ce que l’on retrouve par exemple dans Indiana, où elle revendique l’égalité sexuelle, l’égalité des droits dans le mariage, l’égalité des responsabilités dans la famille ou encore l’égalité devant l’instruction, l’éducation. L’éducation qui doit émanciper à la fois la femme vis-à-vis de l’homme et l’homme vis-à-vis de son exploiteur. Cet autre sujet qui fut cher à Sand se retrouve dans Isidora (1846), son héros Jacques n’accepte pas l’idée selon laquelle "la femme a moins de capacités que l’homme pour les hautes études, dans la métaphysique comme dans les sciences exactes." Le roman est d’ailleurs introduit par une question que se pose Jacques : "L’espèce humaine est-elle composée de deux êtres différents, l’homme et la femme ?" Parmi les autres œuvres qui illustrent le combat de leur autrice en faveur des femmes : Gabriel (1839), Le compagnon du Tour de France (1840) et Les lettres à Marcie.

George Sand abhorra la violence et la guerre, ce qu’elle exprima à nombre de reprises. Dans George Sand, le parti du peuple (2004, rééd. 2018), Jean-Claude Sandrier revient sur ce sujet à travers l’évocation de plusieurs faits que l’autrice de La Mare au diable (1846) vécut. Citons pour exemples l’insurrection républicaine à Paris les 05 et 06/06/1832, la révolution française de 1848, parfois dénommée "révolution de Février", qui se déroula dans la capitale du 22 au 25/02/1848, ou encore les journées de Juin, révolte d'ouvriers parisiens du 22 au 26/06/1848, réprimée dans le sang. Sans oublier non plus la Commune de Paris, période insurrectionnelle qui dura un peu plus de deux mois, du 18/03/1871 à la "Semaine sanglante" du 21 au 28/05/1871.

George Sand considéra assurément qu’aucune cause n’exige une telle violence et, en cela, elle prôna toujours une action humaine et pacifique. Ce sont des pensées que l’on retrouve dans l’œuvre de Georges Brassens, en particulier dans Les deux oncles et Mourir pour des idées.


Encor s'il suffisait de quelques hécatombes
Pour qu'enfin tout changeât, qu'enfin tout s'arrangeât !
Depuis tant de "grands soirs" que tant de têtes tombent,
Au paradis sur terre on y serait déjà.
Mais l'âge d'or sans cesse est remis aux calendes,
Les dieux ont toujours soif, n'en ont jamais assez,
Et c'est la mort, la mort toujours recommencé’…
Mourons pour des idées, d'accord, mais de mort lente,
D'accord, mais de mort lente.

Dans ces deux chansons, la notion de pacifisme est poussée à l’extrême. Citons également La guerre de 14-18 ou encore La pacifiste (texte inédit et non daté, que Jean-Paul Liégeois (éditeur des Œuvres Complètes de Georges Brassens aux Éditions Le Cherche-Midi) estime probablement écrite au début des années 1970, alors que la guerre du Vietnam est à son point culminant et très vivement contestée), mise en musique et enregistrée par Jacques Muñoz en 2004.

Si George Sand admit "combien il est difficile à une société de se transformer sans combat et sans violence", elle ajouta que "notre idéal" est d’effectuer cette transformation sans guerre entre les citoyens. [Sandrier J.-C. - George Sand, le parti du peuple - p. 69]

George Sand: "Sans la guerre civile, on pouvait convertir la France ; et avec, elle recule encore plus dans la crainte de l’avenir et l’amour bête du passé." [Lettre à Edmond Plauchut - Nohant, 26/03/1871]


George Sand est citée dans La Lune écoute aux portes (1947), tout comme celui qui fut un de ses plus célèbres amants: Alfred de Musset:

Un véritable muséum empli d'objets hétéroclites provenant d'hommes de pensée.

Crâne de Racine, dernière diarrhée de Hugo, linge périodique de George Sand, morceau de chair pourrie de la cuisse de Rimbaud, patte du homard familier de Gérard de Nerval, cure-dent d'Alfred Jarry, plaque muqueuse de Baudelaire, pirouette de Charles Cros, crachat de Valéry, testicules d'Eluard, vomissement de Musset (...)

Alfred de Musset par Charles Landelle
Très apprécié de Brassens, ce poète et dramaturge de la période romantique fut aussi source d'inspiration. A titre d'exemple, l'utilisation du prénom Margot dans Les amours d'antan trouve possiblement son origine dans le poème Après une lecture (1842):

Vive le vieux roman, vive la page heureuse
Que tourne sur la mousse une belle amoureuse !
Vive d’un doigt coquet le livre déchiré,
Qu’arrose dans le bain le robinet doré !
Et, que tous les pédants frappent leur tête creuse,
Vive le mélodrame où Margot a pleuré !

Diminutif au caractère désinvolte de Marguerite, Margot suggère la simplicité, la fraîcheur de la jeune fille évoquée dans la chanson de Georges. Sans compter l'allusion au fameux jeu - efflorer la marguerite - censé refléter les sentiments de l'être aimé. D'autre part, le septième quatrain de Honte à qui peut chanter contient aussi une allusion claire à l’œuvre d'Alfred de Musset: 

Honte à cet effronté qui peut chanter pendant
Que Rome brûle, ell' brûl' tout l' temps...
Honte à qui malgré tout fredonne des chansons
A Gavroche, à Mimi Pinson

Mimi Pinson, profil de grisette est en effet le titre d'un poème paru dans Le Diable à Paris (1845-1846), recueil en deux tomes publié sous la houlette de Pierre-Jules Hetzel. La troisième strophe de la Supplique pour être enterré à la plage de Sète y fait référence de la même manière. De plus, dans dixième strophe, le vers Planter, je vous en prie, une espèce de pin renvoie immanquablement au poème Lucie, tiré du recueil Poésies nouvelles (1850):

Mes chers amis, quand je mourrai,
Plantez un saule au cimetière.
J'aime son feuillage éploré ;
La pâleur m'en est douce et chère,
Et son ombre sera légère
À la terre où je dormirai.

Alfred de Musset fut mis en musique deux fois par Georges Brassens avec Ballade à la lune et A mon frère, revenant d'Italie, issues de la série poétique Pirouettes, coproduite par Claude Wargnier et Lucienne Letondal, diffusée de septembre 1979 à juillet 1980 sur Europe 1. Ces deux chansons furent enregistrées à domicile, rue Santos-Dumont, entre mars et juillet 1979. Assez méconnues du grand public, elles ne figurent pas sur un album original du sétois moustachu mais sur le disque posthume Georges Brassens chante Bruant, Colpi, Musset, Nadaud, Norge (Philips 822 257-1) paru en 1983.

Ballade à la lune, poème extrait du recueil Contes d'Espagne et d'Italie (1830), décrit un couple de bourgeois au lit sous l’œil goguenard de la lune, ce qui lui valut à Musset d'être qualifié de poète licencieux par la critique littéraire classique. L'éloquence, l'irrévérence de Musset intéressa Brassens tout autant que sa maîtrise du vers. Ici, 34 strophes, chacune alternant deux hexasyllabes, un vers de deux pieds puis un troisième hexasyllabe. Georges n'en retint que douze, la dernière étant bissée, comme l'indique Jacques Vassal dans son Brassens, homme libre (2011). On soulignera la huitième strophe (la septième, dans la chanson) et surtout, son premier vers: "Qui t'avait éborgnée". Brassens prononce "Qui t'avait-z-éborgnée", peut-être pour une diction plus aisée. En outre, il modifia le vers "A quelque arbre pointu ?" en "Contre un arbre pointu ?":
 

A mon frère, revenant d'Italie, écrit en mars 1844 et publié pour la première fois dans la Revue des Deux-Mondes le 1er avril suivant, est inspiré par le récit du grand tour d’Italie que fit Paul de Musset, permettant ainsi à l'auteur de On ne badine pas avec l’amour (1834) de voyager par procuration en contrée transalpine où il eut séjourné avec George Sand dix ans auparavant. Le périple vénitien des amants romantiques et désespérés enfanta Lorenzaccio (1834), sur une idée de George Sand qui eut offert à Musset le manuscrit de son essai inédit intitulé Une conspiration en 1537.

Longue chronique poétique surtout destinée au cercle des intimes de son auteur [Sermonte J.-P. - Brassens et les Poètes - p. 109], A mon frère, revenant d'Italie comporte pas moins de 32 sizains alternant deux fois deux octosyllabes et deux tétrasyllabes. Brassens en tira une longue chanson de 4 minutes et 53 secondes, toutefois dépassée par la Supplique pour être enterré à la plage de Sète et ses 7 minutes et 21 secondes. Georges effectua nombre de coupures dans les descriptions qui parsèment le poème et ne mit en exergue que dix strophes pour créer son morceau.

Après l'allusion d'une certaine saveur à la chute de Jules César, vient la troisième strophe: celle mettant en valeur Naples. L'auteur des Copains d'abord n'y fut très probablement pas insensible: cela ne lui eut-il pas évoqué la petite commune de Marsico Nuovo, située en province de Potenza, dans la Basilicate, et dont sa famille maternelle est originaire ? La quatrième strophe de la chanson (la huitième du poème) met en valeur le peuple italien selon les ressentiments de Musset:
 
Qu'il soit rusé, simple ou moqueur,
N'est-ce pas qu'il nous laisse au cœur
Un charme étrange,
Ce peuple ami de la gaieté
Qui donnerait gloire et beauté
Pour une orange ?


Sans oublier l'allusion à la relation tumultueuse de l'auteur de Lorenzaccio avec George Sand, conservée elle aussi:

Toits superbes ! Froids monuments !
Linceul d'or sur des ossements !
Ci-gît Venise.
Là mon pauvre cœur est resté.

L'épilogue, qui révèle un poète demandant à son frère de ne plus s'éloigner, est en accord avec la tendance casanière de Brassens. Toutefois, le sétois opère une petite modification du premier vers dans lequel il remplace le mot "Ami" par "Frère".

Ami, ne t'en va plus si loin.
D'un peu d'aide j'ai grand besoin,

Au service de ce voyage virtuel en Italie se met la guitare de Joel Favreau, dont l'introduction est particulièrement recherchée. La chanson est saluée par Robert Le Gresley s'imaginant dans la peau d'Alfred de Musset le temps d'écrire un hommage intitulé C'était à la nuit brune, dans son livre Pour vous Monsieur Brassens, d'affectueuses irrévérences.
 

Musset, sous la plume de Le Gresley, rend hommage à Georges et son œuvre, laquelle a permis de faire très largement connaître un certain nombre de poèmes alors mis en musique: "Si nos vers ont ajouté de la noblesse à votre répertoire, vos musiques ont démocratisé notre poésie." Il est également intéressant de noter la mention du titre du chapitre de Contes d'Espagne et d'Italie dans lequel figure Ballade à la lune: Chansons à mettre en musique et fragmens. Pour la curiosité, les deux orfèvres des mots se côtoyèrent au-delà des connivences littéraires entre leurs œuvres respectives: par le biais d'une des tournées parisiennes du sétois moustachu avec les Tréteaux de France, avec une représentation des Caprices de Marianne (1833) en première partie. [Vassal J. - Brassens, le regard de Gibraltar - p. 150]

- Un grand merci à Pierre Schuller (Auprès de son Arbre) pour sa collaboration à la rédaction de cet article ! -


*En 1978, Brassens rédigea une préface pour le peintre Hervé des Hameaux (manuscrit publié par Mario Poletti dans son ouvrage Brassens me disait... paru en 2011), de deux ans son cadet et qui fut élève à l'atelier Brianchon, à l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs. Au fil des nombreux salons auxquels il participa, Hervé des Hameaux exposa entre autres des tableaux représentant des paysages de la Creuse (dont la majeure partie du canton de Boussac constituait la pointe méridionale de l'ancienne province du Berry) et de la Manche. Brassens, dans sa préface, évoque sa découverte artistique de ces deux départements qu'il a souvent traversés, sans s'y être significativement arrêté (il n'a pas donné de récital en Creuse et ne s'est produit que deux fois dans la Manche: le 24/08/1953 à Granville et le 07/12/1958 à Cherbourg).

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