A propos de ce blog

C'est durant ma petite enfance que j'ai découvert l’œuvre de Georges Brassens, grâce à mon père qui l’écoute souvent durant les longs trajets en voiture. Sur la route des vacances estivales, j'ai entendu pour la première fois Le Petit Cheval alors que je n'avais que 4 ans. C'était en août 1981. Au fil des années, le petit garçon que j'étais alors a découvert bien d'autres chansons. Dès l'adolescence, Georges Brassens était ancré dans mes racines musicales, au même titre que Jacques Brel, Léo Ferré, Barbara et les autres grands auteurs-compositeurs de la même génération. M’intéressant plus particulièrement à l’univers du poète sétois, je me suis alors mis à réunir ses albums originaux ainsi que divers ouvrages et autres documents, avant de démarrer une collection de disques vinyles à la fin des années 1990. Brassens en fait bien entendu partie. Cet engouement s’est accru au fil du temps et d’évènements tels que le Festival de Saint-Cyr-sur-Morin (31/03/2007) avec l’association Auprès de son Arbre. À l’occasion de la commémoration de l’année Brassens (2011), j’ai souhaité créer ce blog, afin de vous faire partager ma passion. Bonne visite... par les routes de printemps !

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"Chaque fois que je chante une chanson, je me fais la belle." Georges Brassens

samedi 5 novembre 2016

Je me suis fait tout petit... de Georges à "Mr. Eddy"

En 1965, je chantais à Bobino et, presque tous les soirs, Georges venait me voir en voisin. Il n'habitait pas loin et je le voyais arriver discrètement. Nous prenions un verre dans la loge, nous bavardions et, à la fin du spectacle, nous poursuivions souvent nos conversations. [Eddy Mitchell in Varrod D., 2012. Eddy Mitchell - Il faut rentrer maintenant..., Éditions de la Martinière, 312 pp.]

L'anecdote relatée par Eddy Mitchell à Didier Varrod remonte au tout début de l'année 1965. Georges Brassens, qui s'était produit dans la célèbre salle du 20, rue de la Gaieté (Paris 14e) du 01 au 10/01, venait de laisser sa place à son confrère qui entamait sa propre tournée trois jours plus tard. Ils avaient fait connaissance quelques années auparavant (une photo publiée sur le blog de José Deregnaucourt, ancien disc-jockey du dancing Le Caméléon, à Condé-sur-l'Escaut dans le département du Nord, en atteste), peut-être au Golf-Drouot, où l'on sait que Brassens s'est assurément rendu au moins deux fois: le 04/01/1968 pour l'enregistrement de l'émission de Claude Cobast C'est Noël (ORTF, 30/12/1968) en soutien du club des Jeunes Amis des Animaux (JAA) fondé par Allain Bougrain-Dubourg et Jean-Paul Steiger, puis le 18/12/1968, à l'occasion d'un gala pour cette même cause. [Sermonte J.-P., 2001. Brassens au bois de son cœur - p. 128] Des précisions demandent toutefois à être apportées, afin de mieux cerner les évènements immortalisés sur le cliché évoqué plus haut. En novembre 1965 paraissait Perspective 66, sixième album d'Eddy enregistré à Londres avec le London All Stars et dans lequel figurent quatre adaptations de classiques de la pop et du rock: Tu ferais mieux de l'oublier (You've got to hide your love away - The Beatles)Aux yeux de ton amour (Lookin' thru the eyes of love - Gene Pitney), Je n'ai qu'un cœur (I've got a heart - Tom Jones) et Rien qu'un seul mot ((I Can't Get No) Satisfaction - The Rolling Stones). Un autre titre marquant, présenté au Palmarès des chansons (ORTF, 20/01/1966): S'il n'en reste qu'un, cri lancé contre la perspective qui se dessinait pour la chanson en France suite à l'avènement de la "période yéyé". Cette dernière n'avait pas affecté Georges, qui rencontrait régulièrement le succès, restant fidèle à lui-même, comme il l'explique dans l'entrefilet Brassens: "J'ai survécu au twist", publié dans l'hebdomadaire Cinémonde et daté du 26/03/1963.


De son côté, Eddy continuait à affirmer, sans prétention aucune, son attachement à ses racines et influences issues du rock'n'roll pour le plus grand plaisir de son public de Bobino. Sa chanson n'avait cependant pas manqué de faire s'échauffer durablement certains esprits. Ce n'est que près d'une quinzaine d'années plus tard que l'auteur de L'épopée du rock avait mis les choses au point dans l'émission de Michel Drucker Les rendez-vous du dimanche (TF1, 02/12/1979): ses paroles étaient à prendre au second degré, ce qu'avait bien compris Georges Brassens, qui figurait parmi ses plus grands soutiens. Les deux artistes n'étaient pas si éloignés qu'on pourrait le croire: ils avaient en commun un respect absolu de la chanson populaire, mais aussi une grande passion pour le jazz, le rythm'n'blues et le rock.

Eddy Mitchell: "Brassens aimait beaucoup de styles de musiques différentes. C'était un artiste doué, éclectique, qui a baigné dans la chanson populaire italienne de par ses origines familiales (...) Mais il était curieux de tous les genres de musique sans pour autant céder à la mode qui arrivait. Il aimait bien le rock, tout en considérant que ce n'était pas pour lui. Et, contrairement à tous ceux qui le portaient aux nues, il nous respectait. Il ne faut pas oublier qu'il avait aussi une culture jazzy manouche; et Django Reinhardt est un petit frère pas si éloigné de la famille du rock." [Eddy Mitchell in Varrod D., 2012. Eddy Mitchell - Il faut rentrer maintenant..., Éditions de la Martinière, 312 pp.]

C'est sans doute ce qui les avait rapprochés à partir de la fin des années 1960 lors d'une entrevue organisée par Jean Serge, qui dirigeait la branche Promotion et spectacles d'Europe 1 de 1968 à 1986. Dans ses mémoires, Eddy Mitchell évoque à ce propos l'intérêt du poète sétois pour nombre de rocks célèbres comme Peggy Sue de Buddy Holly. Sa discothèque en regorgeait très certainement. "Schmoll" l'assurait par ailleurs dans le Tête-à-tête du 18/08/2012 avec Frédéric Taddéï sur France Culture. En outre, il est intéressant de revenir sur plusieurs séquences radiophoniques réunissant l'auteur des Copains d'abord et celui de Sur la route de Memphis. Elles sont issues des émissions 5, 6, 7 de Jacques Ourevitch. Citons tout d'abord celle du 02/02/1974, sur le thème "Ils chantent les chansons de Georges Brassens", avec Salvatore Adamo, Philippe Chatel, Nicole Croisille, Nicoletta, Daniel Guichard, Gérard Lenormand et Eddy Mitchell. Ce dernier avait interprété Je me suis fait tout petit, ce qu'il a réitéré un certain nombre de fois dans 5, 6, 7, en particulier lors d'une émission spéciale pour les 53 ans de Georges, le 22/10/1974. A cette occasion unique, "Schmoll" était accompagné par le sétois moustachu à la guitare, sous les yeux de Guy Béart, lui aussi invité (l'enregistrement figure sur le CD N°36 - Et Maintenant quelque chose de différent - de l'Intégrale 50 Ans De Carrière d'Eddy Mitchell).


On se souvient aussi de l'émission télévisée dominicale Musique and music de Jacques Martin, diffusée le 03/04/1977 sur Antenne 2. Parmi les artistes invités à chanter en hommage à Brassens figuraient Salvatore Adamo (Le parapluie), Enrico Macias (Chanson pour l'Auvergnat), Eddy Mitchell (Je me suis fait tout petit), Nicoletta (Les amoureux des bancs publics), Mort Shuman (La première fille - dans la langue de Shakespeare) et Rika Zaraï (Chanson pour l'Auvergnat - en hébreu). Un article de Camille Rouvier*, titré Brassens sans Brassens, revient sur l'évènement en soulignant les prestations de Rika Zaraï ainsi que celle de Nicoletta. Les honneurs reviennent sans conteste à la version rock de Je me suis fait tout petit, qu'Eddy Mitchell a créée, accompagné par plusieurs musiciens et une choriste. Dans son ouvrage Brassens au bois de son cœur (2001), Jean-Paul Sermonte a publié une photo prise sur le plateau de l'émission. Jacques Martin et l'ensemble de ses invités applaudissent le "Bon Maître" sur scène. On aperçoit Stéphane Collaro, lui aussi présent. D'après une coupure de presse jointe à ce cliché, le tournage avait eu lieu le 31/03/1977 au théâtre de l'Empire, dans une ambiance festive autour de Brassens dont l'apparition sur scène avait fait lever spontanément le public qui entonnait Les copains d'abord. A noter que pour l'émission, Georges avait interprété deux chansons de son répertoire: Le modeste et Cupidon s'en fout.

Georges Brassens sur le plateau de l'émission Musique and Music (03/04/1977) D.R.

Du 09 au 15/04/1979 était diffusée l'émission Top Club - Spécial Brassens, sur Antenne 2. Guy Lux y recevait le poète sétois ainsi que de nombreux invités dont Marcel Amont, Jacques Canetti, Les Compagnons de la chanson, Pierre Louki, Nicole Croisille, Alain Souchon, Eddy Mitchell et Serge Lama. Georges Brassens chantait plusieurs chansons, accompagné par Joel Favreau à la guitare et Pierre Nicolas à la contrebasse.

Guy Lux, Georges Brassens et Eddy Mitchell (Top Club - Spécial Brassens) D.R.

L'année 1979 voyait aussi toute la troupe du conte musical Émilie Jolie réunie autour de Michel Drucker dans Les rendez-vous du dimanche (TF1, 02/12/1979). Devant Robert Charlebois, Philippe Chatel, Louis Chédid, Julien Clerc, Diane Dufresne, Françoise Hardy, Isabelle Mayereau, Eddy Mitchell, Henri Salvador, Yves Simon, Alain Souchon, Sylvie Vartan et Laurent Voulzy, Georges Brassens alias le hérisson interprétait Histoire de Faussaire et Élégie à un rat de cave (avec Moustache et Les Petits Français). Suivait Les copains d'abord dans sa version jazz par Moustache et Les Petits Français. Il s'agissait là sans doute de la dernière fois que "Schmoll" et Georges voyaient leurs chemins se croiser.

Le 01/02/1982, Iván Lévai rendait hommage à Brassens dans son émission Radio Libre, sur Europe 1, avec l'intervention en direct de plusieurs de ses amis et proches. Étaient présents en studio: Raymond Devos, Eddy Mitchell, Georges Moustaki, Pierre Nicolas, Jean Serge et Claude Wargnier. Sans oublier le passage de nombreux enregistrements inédits extraits de l'émission Pirouettes (diffusée sur Europe 1 le dimanche entre 12H à 12H30 de mars 1979 à juillet 1980). "Il faut donner du noir et blanc à l'auditeur et au spectateur pour qu'il puisse y mettre lui même la couleur", disait Georges. Le rock est celle d'Eddy Mitchell, qui a contribué lui aussi avec talent, à mettre en valeur la richesse musicale de l’œuvre du sétois moustachu.


- Un grand merci à Michel Brillié, à Pierre Schuller (Auprès de son Arbre), ainsi qu'aux Amis de Georges pour leurs recherches ainsi que tous les échanges passionnants qui m'ont beaucoup aidé dans le cadre de mes travaux. Leur collaboration fut précieuse pour la rédaction de cet article ! -


*A ce jour, il n'a pas été possible d'en identifier la publication avec certitude. Il semblerait qu'il s'agisse du quotidien Le Provençal. [Source: Auprès de son Arbre]

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