A propos de ce blog

C'est durant ma petite enfance que j'ai découvert l’œuvre de Georges Brassens, grâce à mon père qui l’écoute souvent durant les longs trajets en voiture. Sur la route des vacances estivales, j'ai entendu pour la première fois Le Petit Cheval alors que je n'avais que 4 ans. C'était en août 1981. Au fil des années, le petit garçon que j'étais alors a découvert bien d'autres chansons. Dès l'adolescence, Georges Brassens était ancré dans mes racines musicales, au même titre que Jacques Brel, Léo Ferré, Barbara et les autres grands auteurs-compositeurs de la même génération. M’intéressant plus particulièrement à l’univers du poète sétois, je me suis alors mis à réunir ses albums originaux ainsi que divers ouvrages et autres documents, avant de démarrer une collection de disques vinyles à la fin des années 1990. Brassens en fait bien entendu partie. Cet engouement s’est accru au fil du temps et d’évènements tels que le Festival de Saint-Cyr-sur-Morin (31/03/2007) avec l’association Auprès de son Arbre. À l’occasion de la commémoration de l’année Brassens (2011), j’ai souhaité créer ce blog, afin de vous faire partager ma passion. Bonne visite... par les routes de printemps !

J'ai rendez-vous avec vous

"Chaque fois que je chante une chanson, je me fais la belle." Georges Brassens

samedi 1 février 2020

"Toi, je vais te piquer ton guitariste."

© T. Atanassov
C’est au cabaret La Colombe, fondé par Beleine et Michel Valette à l’emplacement d’un petit bistrot sis au 4, rue de la Colombe dans l’île de la Cité (Paris 4e) et dont ils prirent la direction le 02/10/1954, que Colette Chevrot débuta deux années plus tard en novembre 1956, interprétant des textes souvent teintés d’humour noir - certains à sens antimilitariste - du comédien Pierre Latour (qu’elle épousa en premières noces), de Boris Vian ou encore de Jean Yanne. Collaborant avec Jacques Estérel et André Popp, elle mit également à son répertoire des chansons de Georges Brassens, Jacques Brel, Bernard Dimey, Raymond Levesque et bien d’autres. Celle qui fut surnommée "la Buster Keaton de la chanson" fit rapidement montre d’une personnalité forte et élégante. De plus, son audace - cachant un trac certain, sa gouaille et son humour ne laissèrent pas son public indifférent. Aussi, dans Le Joli Temps de La Colombe (2013), Michel Valette se souvient qu’elle donna un côté vachard et grinçant à son interprétation de quelques chansons humoristiques (parmi celles, datant de la Belle Époque, que le comédien Lucien Raimbourg lui fit découvrir) empruntées au répertoire de Cora Vaucaire.

Jacques Canetti fit monter Colette Chevrot sur la scène des Trois Baudets en la plaçant à l’affiche du spectacle HI-FI (décembre 1956 à mars 1957) qui a pour vedettes Pierre Dac et Francis Blanche. À leurs côtés sont programmés Raymond Devos, Francis Lemarque, Monique Senator, Henri Garcin et Maurice Vamby. Sans oublier un jeune auteur-compositeur-interprète qui débute alors: Guy Béart, celui-là même qui fit venir Colette à La Colombe un an après y avoir fait ses premiers pas. Ainsi que le raconte Michel Valette, Les Trois Baudets furent, via l’entremise de leur directeur, le théâtre de la rencontre entre l’interprète de Ce n'est pas que l'on soit méchant (chanson figurant sur le super 45T Columbia ESFR 1144 M, paru en 1957) et Georges Brassens. Les deux artistes s’apprécièrent mutuellement. En juillet 1957, Colette Chevrot fut sollicitée par Jacques Canetti dans l’optique de créer une chanson d’André Popp et François Billetdoux: Complainte du téléphone. Par la suite, Juliette Gréco l’enregistra pour une publication en tant que titre fort de son super 45T Fontana 460.531 ME en 1958.

Ses prestations dans divers hauts lieux de la chanson francophone amenèrent Colette à fréquenter nombre de confrères/consœurs auprès desquel(-le)s elle manifesta une grande gentillesse. Jusqu’à même les recommander auprès de Michel Valette… si d’aventure, ils/elles eurent reçu ses faveurs ! Car, à l’instar de Brassens, elle ne se montra pas indulgente avec tout(e)s les artistes. Pour en revenir au poète sétois, Colette Chevrot partagea avec lui la caractéristique de s’accompagner à la guitare. À La Colombe, elle se produisit dans la salle du rez-de-chaussée et fit partie des artistes les plus fréquemment programmés entre 1956 et 1962. [Valette M. - Le Joli Temps de La Colombe - p. 77] Elle y interpréta pour la première fois et avec succès La complainte des filles de joie*, que Brassens enregistra durant les 23 et 24/10/1961, pour une publication sur le 33T 25 cm Georges Brassens N°8 (Philips B 76.512 R) le mois suivant. Michel Valette se souvient que sa protégée fut régulièrement courtisée et tira parti de la situation pour faire porter sa guitare par ses adorateurs. Parmi ces derniers, Georges Moustaki et Marc Ogeret.

Michel Valette: "Nous nous en amusions chaque fois qu’elle arrivait à La Colombe avec un nouveau porteur de guitare"

Et Brassens, alors ! comme écrit Roger Comte dans son ouvrage Mon équipée avec Georges Brassens (1999). Il répondit très vite présent afin d’encourager Colette lorsqu’elle eut à affronter le public. Leurs chemins respectifs se croisèrent parfois, comme par exemple chez le luthier Jacques Favino dont l’auteur-compositeur de J’ai rendez-vous avec vous et sa consœur devinrent des clients assidus (à ce sujet, notons que le célèbre luthier révèle, au fil d'une interview réalisée par Patrice Veillon le 11/06/1994 à Paris que ce serait le chansonnier Jacques Grello qui lui aurait fait connaître Brassens). Ou bien encore lorsque Georges, qui se produisit les 12/03/1959 à Montpellier puis le 05/04/1959 à Sète, fut invité avec Manitas de Plata par Madeleine Attal, directrice de Radio Montpellier. Bernard Barraillé couvrit l'évènement par une série de prises de vues dans le studio de la rue République.

Mais, ce n’est qu’à partir des années 1960 que des liens plus profonds, tant amicaux qu’artistiques, se tissèrent entre eux. Le sétois moustachu fut ainsi le témoin de Colette lors du mariage de celle-ci avec Jean-Pierre Lang le 23/12/1966 à la mairie du 15e arrondissement de Paris. Un article de Jean Favières titré Brassens au mariage …mais ce n'était pas le sien ! et paru dans Ici Paris le mois suivant relate l’évènement. L’auteur-compositeur d’origine corse exerça le métier de professeur de français à l’Alliance Française de São Paulo lorsqu'il commença à écrire et composer ses premières musiques pour le théâtre et ses premières chansons pour des artistes locaux qui lui firent découvrir les rythmes du Brésil. En témoigne son super 45T Quatre chansons françaises qui expliquent la bossa-nova (La voix de son maître, 7 EGF 792), paru en 1965. C’est à cette époque que Jean-Pierre Lang persuada Colette Chevrot de faire évoluer son répertoire ainsi que son style d’interprétation. Dans Le Joli Temps de La Colombe, Michel Valette discute cette mutation, tout en louant les talents de compositeur de celui qui, à partir de 1975, créa près de cent quatre-vingt chansons avec Pierre Bachelet. Colette obtint quelque succès avec des chansons comme Ce n’est pas avec des mots, Dis, quand partiras-tu ?, Que c’est bête les hommes, mais aussi Jeanne Calamité. Cette dernière peut, du fait de son titre, constituer un clin d’œil à Jeanne Planche, surnommée "Calamity Jeanne" par Georges Brassens et à qui il arriva à Colette de rendre service en lui apportant quelques victuailles (de la part du sétois, après que celui-ci eut quitté l'impasse Florimont à la fin du printemps 1966). Mais en réalité, le texte est autobiographique et évoque le caractère entier et les "gros mots" de son autrice. Jeanne Calamité est, avec Les faux culs, Dis, quand partiras-tu ? et Les livres et les cahiers, une des chansons enregistrées en public à Bobino pour le super 45T Fontana ‎460.997 ME (1966).

La musique composée pour Les livres et les cahiers, texte antimilitariste, est l’œuvre de Joel Favreau. Suite à une rencontre au cours d’une soirée Chez Bernadette où il joua, le guitariste eut rejoint Jean-Pierre Lang pour accompagner Colette sur suggestion d’icelle. Parmi les autres chansons qui marquèrent leur collaboration, citons également L’eau et la pierre, Cercle vicieux, mais aussi Cette chanson-là, qui devint le titre fort du super 45T Fontana ‎460.978 ME paru en 1966 et qui assura à Colette un succès certain - à défaut d’une victoire - lors de l’édition de la Rose d’Or d’Antibes de cette même année. On notera que Michel Polnareff y reçut le prix de la critique avec Love Me, Please, Love Me. [Favreau J. - Quelques notes avec Brassens - p. 46] En ce qui concerne Cercle vicieux, il s’agit d’une chanson que Jean-Claude Pascal enregistra pour son super 45T La Voix De Son Maître ‎EGF 886, sur lequel figure également Ce n’est pas avec des mots, écrite avec Jean-Pierre Lang.

L’année 1966 fut celle de la présentation de Joel Favreau à Georges Brassens par Colette Chevrot, à l’occasion du spectacle Chanson au TNP. Du 16/09 au 22/10/1966, le poète sétois y tint la vedette, avec Juliette Gréco en première partie. Durant l’une des prestations de "la prêtresse noire", comme la surnomma Georges, Colette rendit visite à l’auteur-compositeur d’Auprès de mon arbre dans sa loge, accompagné de Joel. Très impressionné, le guitariste fut néanmoins mis à l’aise progressivement par un Brassens bienveillant, échangeant avec simplicité et humour avec ses hôtes. Le suivant dans les coulisses en attendant son passage en scène, Colette et Joel (pour qui ce fut une expérience inédite) furent ensuite témoins privilégiés de la complicité immédiate qu’il créait avec son auditoire.

Joel Favreau: "(…) il a fait son entrée, accueilli par une ovation énorme, qui durait, durait, pendant qu’il arpentait cette immense scène en attendant que le public se calme, ce qui s’est produit aussitôt qu’il a posé le pied sur sa chaise." [Favreau J. - Quelques notes avec Brassens - p. 48]

Les trois artistes se retrouvèrent dans l’appartement acquis par Brassens il y a peu dans l'immeuble "Le Méridien de Paris" (22-34, rue Darreau ; 5-19, rue Émile Dubois), situé au nord du 14e arrondissement. Colette Chevrot, qui le lui eut trouvé à sa demande, l’aida à emménager. Bricoleuse de talent, tout particulièrement dans le domaine de la menuiserie, c’est elle qui, avec l’aide de Joel Favreau, installa les rayonnages sur mesure des bibliothèques de Georges. À Crespières également, Colette participa à quelques travaux… de maçonnerie sur le pilier droit du portail du "Moulin de la Bonde" avec Martial Carré. Le chansonnier, qui participa à la tournée de la fin de l’année 1966 avec Brassens, en témoigne : "Georges, notre manœuvre, faisait tourner la bétonnière. Des souvenirs qui restent gravés en mémoire"

Organisée par Jacques Canetti, la tournée du Festival du Disque 1966, évoquée plus haut, fit étape dans trente-trois villes de France du 04/11/1966 au 19/12/1966. Voici les différentes dates, d’après les archives de Pierre Onténiente et les travaux de recherche de l’association Auprès de son Arbre: Rouen (04/11), Roubaix (05/11), Amiens (05/11), Lille (07/11), Orléans (08/11), Le Mans (09/11), Rennes (10/11), Tours (11/11), Caen (13-14/11), Nantes (15/11), Poitiers (16/11), Angers (17/11), Limoges (18/11), Bordeaux (20/11), Toulouse (21/11), Carcassonne (22/11), Nîmes (23/11), Marseille (25-30/11), Montpellier (01/12), Sète (03/12), Toulon (04/12), Nice (05/12), Aix-en-Provence (06/12) Avignon (07/12), Saint-Etienne (08/12), Thonon-les-Bains (10/12), Grenoble (11/12), Villefranche-sur-Saône (12/12), Mâcon (13/12), Annecy (14/12), Lyon (15-16/12), Clermont-Ferrand (18/12) et Dijon (19/12). Le programme de la tournée, qui reprend la charte graphique de celui du spectacle Chanson au TNP (rappelé dans un court texte présentant Jacques Canetti), présente le contenu de la première partie comme suit : Jean-Pierre Lang, Martial Carré (accompagné par Philippe Marcillac au piano), Colette Chevrot (accompagnée par Jean-Noël Favrot [sic] et Jean-Pierre Lang) et Boby Lapointe en vedette américaine. En outre, on y trouve un texte de présentation de René Fallet dont le titre est Brassens, un poète qui descend dans la rue comme une émeute, ainsi que le fac-similé d’un brouillon de la Chanson pour l’auvergnat. Colette Chevrot, elle, est mise en valeur par une photo portrait ainsi que le rappel publicitaire de son super 45T Cette chanson-là (Fontana ‎460.978 ME). Nombre d’articles de presse écrite, écorchant fréquemment au passage les patronymes des artistes de la première partie, relatèrent chaque étape de la tournée.

Georges Brassens au Palais d'Hiver de Lyon (15/12/1966)
© Bibliothèque municipale de Lyon - Collection Georges Vermard

En voici une sélection, à commencer par Le Courrier Picard du 08/11/1966 qui donne un compte-rendu du concert d’Amiens dans un article titré Salle comble pour Brassens. On y apprend que, durant son set, Colette Chevrot a chanté L’éléphant rose, À cœur découvert, Les livres et les cahiers (l’article indique que ce titre fut interdit d’antenne), C’était plutôt bien et Cette chanson-là. Dans Ouest-France Ille-et-Villaine du 12/11/1966, Henri Terriere rend compte de la soirée au cinéma Le Royal de Rennes, tandis que Cossart s’intéresse à celle de l'ABC Le Mans dans La Mayenne Libre du 14/11. Un article daté du lendemain, dans l’édition du Calvados de Ouest-France, met surtout en avant la prestation de Boby Lapointe au Théâtre-Maison de la Culture de Caen, annoncée dans le même quotidien cinq jours avant. C'est le seul à exprimer un ressenti nettement négatif sur Martial Carré ainsi que le passage de Colette Chevrot, pointant un manque d’inspiration. Plus indulgente est l’appréciation des trois chansons interprétées par Jean-Pierre Lang. C’est L'Echo du Centre du 21/11/1966 qui relate la soirée limougeaude dans Pour Brassens le Paris a fait le plein. Dans La Dépêche du Midi, Charles Mouly retrace le concert du Théâtre du Capitole à Toulouse dans un article de l’édition du 23/11/1966: Le triomphe de Georges Brassens. J. Bonnet, lui, publie Brassens sur scène, c'est encore plus vrai et infiniment bon dans l’édition du 24/11 au sujet de la soirée de Carcassonne (annoncée via un entrefilet le jour même), sise dans ce qui est l’actuel Théâtre Municipal Jean-Alary. L’édition locale du quotidien L'Indépendant s’en fait également l’écho avec Brassens égal à lui-même, article publié dans la rubrique Arts et Spectacles du journal. L'édition de l'Aude de Midi Libre du 24/11 n’est pas en reste, avec deux articles: l’un signé P.B., faisant suite à l’entrefilet du numéro du 22/11 et ayant pour titre Brassens, souriant et non conformiste a remporté un très large succès, l’autre de Pierre Vanhove qui s’exprime comme suit: Derrière Brassens ressuscité, une ombre, celle de la mort. L'accent est mis sur le triomphe du sétois moustachu dans la ville célèbre pour sa cité médiévale restaurée par Viollet-le-Duc au XIXe siècle. Par ailleurs, il nous est indiqué que le set de Colette Chevrot connut quelques modifications, avec La boîte aux lettres et Je suis la fleur, nouvellement incluses. Les livres et les cahiers reste un titre fort. Toujours dans Midi Libre mais, cette fois-ci, l’édition du Gard, le concert du Théâtre municipal, ou Grand Théâtre de Nîmes est annoncé le matin du 23/11: Ce soir, au théâtre municipal - Georges Brassens présentera ses nouvelles chansons. Le lendemain, un compte-rendu titré Un triomphe de plus pour Georges Brassens fait état d’un public emballé par le spectacle auquel il assista, bien que les artistes de la première partie - Boby Lapointe excepté - eurent semblé ressentir une certaine réserve de la part des spectateurs à leur égard. Pour autant, ils réussirent à les conquérir grâce à leur talent. Nîmes Soir, qui annonce le concert par un entrefilet dans son numéro du 18/11/1966, consacre essentiellement Brassens et Boby Lapointe via un article de Gérard Rouquie titrant Hier soir au Théâtre municipal, show triomphal pour Brassens. Jean-Pierre Lang, Martial Carré et Colette Chevrot ne sont que brièvement mentionnés.

Georges Brassens dans sa loge (Lyon, 15/12/1966)
© Bibliothèque municipale de Lyon - Collection Georges Vermard

Dans son numéro du 06/12/1966, Nice Matin publie une interview de Georges réalisée juste avant son entrée en scène au Palais de la Méditerranée à Nice: Brassens: "Une musique cela s'use plus vite qu'un texte". Le compte-rendu qui suit loue entre autres la prestation de Boby Lapointe et fait un parallèle artistique entre Colette Chevrot et Anne Sylvestre ainsi qu’Hugues Aufray. Le poète sétois accorda également quelques minutes d’entretien à Var Matin, qui publie un court billet dans son numéro du 05/12: Georges Brassens acclamé hier soir à Toulon: Mes chansons… une espèce d’émotion. C’est Line Brun qui rédige le compte-rendu très fourni du tour de chant sis à l’Opéra de la ville natale de Raimu. Son article Georges Brassens: le "grand" de la chanson paraît dans le numéro du 06/12 avec un chapeau encadré: Les feux de la rampe. Le récital donné dans la salle du Rex d’Aix-en-Provence, remise à neuf au printemps 1962, nous est raconté par la plume de Pierre Nembriny dans Le Méridional du 08/12 à travers un article qui a pour titre Poète de notre temps - Brassens suit en chantant le chemin qui mène à cent ans. On y trouve, là aussi, une comparaison de Colette Chevrot à Hugues Aufray, à qui le journaliste la voit susceptible de succéder. Enfin, un compte-rendu du spectacle d’Avignon nous est donné dans Le Provençal du 09/12 par J.-L. L. sous le titre Brassens de tous les temps avec, en illustration, un montage photographique montrant simultanément deux expressions du visage de Georges sur scène. Et c’est dans Le Dauphiné libéré du 12 /12 que la soirée grenobloise est retracée par R.L. Lachat: BRASSENS cher vieil ours nourri de myosotis. La tournée du Festival du Disque 1966 fut riche en souvenirs pour nos artistes de la chanson, comme nous le raconte Joel Favreau dans Quelques notes avec Brassens (2017). Durant cette période, il prit très vite l'habitude d'aller retrouver Georges Brassens dans sa loge après le passage de Colette Chevrot et durant une bonne partie de l’entracte, tandis que celui-ci eut commencé à chauffer sa voix et sa guitare. [Sermonte J.-P. - Brassens au bois de son cœur - p. 190] Lors d'une des étapes de la tournée, l'auteur-compositeur de La non-demande en mariage fit part à Colette de son souhait de voir Joel collaborer avec lui: "Toi, je vais te piquer ton guitariste." Une histoire autant amicale qu’artistique alla s’écrire six années plus tard, après la disparition de Barthélémy Rosso en 1971.

Mais revenons au début de l’année 1967, qui vit le sétois moustachu se produire à Bobino du 10/01 au 19/02. En première partie: Armand Motta, Françoise Doucet, Les Rios, Colette Chevrot, Les Masques, le duo comique "Muller et Ferrière", ainsi que Georgette Lemaire. Un document vidéo issu des collections de l’INA donne un aperçu d’une des soirées. Il s’agit d’un reportage diffusé dans le Journal de Paris d’Agnès de La Faye, sur la première chaîne de l’ORTF le 12/01/1967. On y voit Georges Brassens dans les coulisses avec Jean-Pierre Chabrol et Georgette Lemaire, puis Colette Chevrot dans loge, accordant une interview. Juste avant son passage en scène, elle est encouragée, réconfortée par Georges. Cette complicité établie entre eux, il l’évoque au micro de la journaliste, tandis que sa consœur interprète Ce n’est pas avec des mots et Dis, quand partiras-tu devant le public.


Une autre séquence avec Colette Chevrot, captée le 11/01/1967 en direct de Bobino, fut diffusée huit jours plus tard dans Le Palmarès des chansons, réalisé par Roger Pradines et animé par Guy Lux, toujours sur la première chaîne de l’ORTF. Sur scène, Colette reprend Les amoureux des bancs publics, accompagnée par l'orchestre de Raymond Lefevre.


Ce Bobino 1967 eut les honneurs de la presse écrite, avec tout d’abord un article de Thérèse Fournier dans France Soir du 12/01: Brassens a débuté à Bobino en chantant pour les ouvriers de Renault. La journaliste revient également sur la tournée de 1966 mais aussi sur le spectacle au TNP. Citons également Michel Perez et son article daté du 13/01 dans Combat: Brassens à Bobino. Le 16/01 dans Le Figaro, L'idole Brassens par Paul Carrière. Sans oublier le grand reportage de René Bourdier dans Les Lettres Françaises du 19/01:

- Trois rendez-vous avec Brassens (I, A micro ouvert)
- Trois rendez-vous avec Brassens (II, En scope)
- Trois rendez-vous avec Brassens (III, En scène)

Le 12/04/1967 sort sur les écrans le film Les aventuriers, de Robert Enrico. François de Roubaix est le compositeur de la bande originale, tandis que la chanson thème, Laetitia, est signée Jean-Pierre Lang. Alain Delon, qui donne la réplique à Lino Ventura et Joanna Shimkus, en est l’interprète. Ce fut l’occasion pour Colette Chevrot de l’inviter à dîner chez elle en compagnie de Georges Brassens. Les deux hommes firent connaissance lors de cette soirée dont le sétois moustachu fut très heureux. Cinq années plus tard, Colette figura parmi les invités de Guy Béart pour l’émission Bienvenue chez... (ORTF, 29/03 et 08/05/1972) consacrée à Brassens. Toutefois, le début des années 1970 marqua sa séparation d’avec Jean-Pierre Lang et son éloignement du monde de la chanson. Plus tard, elle s’installa en Lozère où elle éleva des chèvres et commercialisa des objets décoratifs artisanaux de sa fabrication…

- Un grand merci à Joel Favreau ainsi qu'à à Pierre Schuller (Auprès de son Arbre) pour leurs conseils lors de l'élaboration de cet article, ainsi que leur relecture ! -


*Michel Valette, que Pierre Dac fit débuter au Bidule (Paris 5e), commença à chanter entre autres le répertoire de Georges Brassens alors que celui-ci n’eut pas encore accédé à la notoriété. Aux débuts de La Colombe, il fut seul animateur, accompagné par un jeune guitariste classique: Bernard Pierrot. Elève de Segovia, Julian Bream et Christian Aubin, le musicien originaire de Puits (21) chantait également. Leurs goûts artistiques étant très proches, Valette et lui se mirent aisément à travailler ensemble, comme on l'apprend dans Le Joli Temps de La Colombe (2013). Dès les premières soirées du célèbre cabaret de l’île de la Cité, le guitariste proposa des sets de cinq à six chansons, parfois plus, mais accompagna aussi Michel Valette qui créa des imitations de diverses personnalités ainsi que des parodies de chansons de la première moitié du XXe siècle et du début des années 1950. Bourvil, Georges Brassens, Yves Montand, Jean Nohain, Jean Sablon, et Charles Trenet, par exemple, figurèrent en bonne place.

3 commentaires:

  1. Grand merci pour cette excellente présentation de Colette Chevrot .. On peut ajouter qu'elle a été à l'origine de la rencontre entre Moustaki et Crolla en 1958, qui fut, dans la foulée la rencontre Paif-Moustaki ..

    Norbert Gabrie

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  2. C'est un site que je découvre, c'est merveilleux, je suis transporté dans les années passées. C'est une cure de jouvence. Brassens c'est toute ma vie. Je reviendrais souvent, très heureux de cette découverte.

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    1. Bonsoir,
      Merci beaucoup à vous. En vous souhaitant de bonnes visites brasséniennes !

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