J’écoute Brassens. Quand c’est lui qui chante. Personne ne devrait s’autoriser à le chanter. Sa voix ne s’est pas encore effacée, que je sache. Et si cela arrive, on le lira et on le lira encore.
On aime réellement Brassens. Mais Georges est oublié. Il était en chair et en os. Il était tellement beau, incroyablement beau. Reste sa voix, il ne faut pas la couvrir.
Je repense avec émotion à ces moments où, entre les deux copains, j’avais une place unique et privilégiée. Il était si rassurant, Georges, que je me sentais là à l’abri des difficultés. Auprès de cet homme pour moi énigmatique, la vie devenait simple.
Agathe Fallet, née Michelle Dubois le 3 novembre 1939, vécut vingt-cinq ans auprès de René Fallet, qu'elle avait épousé, et ainsi très près de Georges Brassens.
Agathe Fallet
Éditions des Équateurs
"Personne ne devrait s’autoriser à le chanter" écrit donc Agathe Fallet. Mais sur le boulevard du temps qui passe, ils sont nombreux et nombreuses, ceux et celles qui s'autorisent à le chanter. Pas toujours pour notre bonheur, mais souvent quand même, et ça n'empêche nullement d'écouter "le moustachu sétois", pour notre bonheur, toujours.
RépondreSupprimerEntièrement d'accord avec toi ! Le sujet que tu soulèves est d'ailleurs très intéressant à discuter en profondeur. Brassens l'avait fait lui-même au cours d'un entretien avec Philippe Chatel. L'extrait en question est cité par Jean-Claude Lamy dans "Brassens, le mécréant de Dieu" (2004):
SupprimerGeorges Brassens: "Mes chansons, une fois qu’elles sont faites, ne m’appartiennent plus. Mais si tu veux mon jugement franc, je t’avouerai que, pour moi, celui qui chante le mieux les chansons de Brassens, c’est lui ! Je dis cela sans prétention aucune. Les interprétations des autres m’apportent quand même quelque chose : une nouvelle façon de recevoir mes chansons, un accompagnement différent, encore que le rythme proprement dit soit difficile à changer. Il est incorporé au morceau. Il peut paraître transformé en apparence, mais en fait, on ne peut pas réellement le bouger. Le rythme, ce sont les mots qui le donnent. Certains ont été choqués par les adaptations qu’on a pu faire de mes chansons. Moi non. Je pense avoir l’oreille fine. Si quelque chose me gêne, je l’enlève, pour ne garder à l’écoute que ce qui me plaît. Tu connais le proverbe : "Si mon ami est borgne, je le regarde de profil." Je me souviens que mon père faisait des contrechants sur des airs de Ray Ventura qui passaient à la radio. Il ajoutait quelque chose que lui seul entendait, mais qui était en fait incorporé à la musique. C’est pareil pour mes chansons. Ceux qui les aiment peuvent entendre les contrechants, l’accompagnement… qui n’y est pas."